dimanche 30 mai 2010

Moral et objet perdus.

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Depuis quelques semaines, mon humeur suit une courbe descendante.
A l’origine de cette dépression se trouve probablement le départ abrupt d’une employée. Celui-ci se préparait déjà depuis un moment : suite à des insatisfactions répétées de ma part, je lui avais donné un ultimatum il y a environ trois mois aux termes duquel si elle ne faisait pas de gros efforts, je me verrais forcé de lui donner son congé, et c’est finalement elle qui a démissionné.

Je me retrouve en conséquence à travailler deux à trois fois plus, à ruminer les raisons de cet échec professionnel et relationnel, incapable pour l’instant d’engager quelqu’un d’autre, et globalement à m’épuiser physiquement et émotionellement.

Hier soir, ce sentiment de dépression a atteint un pic lorsque, de retour à la maison pour une soirée de week-end, je me suis trouvé incapable, comme je l’avais préalablement décidé, de m’atteler à reprendre mon blog, et tout aussi incapable de regarder le film qu’un client m’avait prêté.
En fait, je me suis rendu compte que je n'arrivais pas à avoir la moindre activité ludique.

Je me suis donc finalement résolu à aller faire une balade avant d’aller me coucher relativement tôt.
Comme la soirée semblait assez douce et que je comptais sortir en chemise et en bermuda, je me suis débarrassé de tous les objets superflus, et n’ai gardé au final que quelques pièces de monnaie, trente francs en billets, mon appareil de photo, mon Iphone et… la clef de mon appartement que j’ai détaché de mon trousseau et rangé dans la poche supérieure droite de mon bermuda.

La promenade a finalement été de courte durée car il faisait nettement plus frais que prévu.
Au retour, je n’avais plus qu’une envie : retrouver les bras de Morphée.
Mais voilà que (hé oui !) en plongeant la main dans ma poche droite, je n’y trouve plus la clef de chez moi !

J’essaye une à une les autres poches et toujours rien. Comme mon bermuda a six poches en tout, je les réexamine une-à-une, et : non, je les avais bien toutes vérifiées.
Comme toujours dans ses cas-là, je commence à envisager le pire, et dans le but de l’exorciser, je vide illico toutes mes poches : je me retrouve avec les pièces de monnaies, les billets, l’appareil de photo, l’Iphone… mais pas de clef.
Au désespoir, je vérifie sous le paillasson, sachant bien que je n’y trouverai rien.
Je suis à un souffle de m’effondrer en pleurs sur les marches de l'escalier. Que puis-je faire ? Je ne peux appeler un serrurier ou ma sœur : je n’ai pas pris mon téléphone portable. Je peux me rendre directement chez ma sœur, mais il est presque 22h et… que pourra-t-elle faire ?
Je veux juste aller me coucher au chaud, dormir, tout oublier.

Ma détresse atteint son comble, lorsqu’une petite voix, mais très petite, je l’entends à peine, me souffle :
« Ta clef est dans ta poche droite, vérifies encore. »
J’en extrais mon I-phone, je le palpe, je démêle nerveusement les fils des écouteurs, et là, au sein de la mini-pelote, ma clef réapparait.

Je n’ai aucun souvenir de la suite.
Je me suis endormi à une vitesse record, et j’ai émergé une dizaine d’heures plus tard, avec un sentiment d’angoisse toujours logé au creux du ventre.
Une journée de plus à affronter.
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samedi 15 mai 2010

Il est né, le divin Hydrocéphale.

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Je suis couché sur une surface dure et froide.

Une infirmière m’a préalablement demandé de me déshabiller jusqu’au slip et a vérifié que je n’avais aucun objet métallique sur moi. ni prothèse, ni pace-maker.

J’ai un peu froid, mais c’est supportable.
L’infirmière me demande si j’ai froid, et je réponds que non. Je regrette presque immédiatement, parce qui si je dois rester couché là et immobile plus qu’une demi-heure –et c’est effectivement prévu- je finirai par avoir froid.
Elle revient quelques minutes plus tard et m’explique la nature de l’examen que je vais subir. Elle me propose des tampons pour les oreilles, car ce sera assez bruyant. Je les accepte bien volontiers. Puis elle me suggère un calmant léger.

« Certaines personnes en ont besoin. Ca les aide à se détendre et à supporter l’immobilité totale. »

« Non, non, ça ira, merci. »

Zut. Et si ça ne va pas ?

« Vous n’êtes pas claustrophobe ? »

« Non, pas du tout. »

Si, un peu.

«Et vous êtes sûr que vous n’avez pas froid ? »

« Non, non. »

Alors qu’elle s’éloigne, je me vois partir à sa poursuite :

« Si, si, j’ai froid. Qu’est-ce que vous proposez ? »

En attendant son retour, je rumine des versions alternatives, et quand elle réapparait, c’est pour m’annoncer :

« On va y aller, alors. Vous êtes prêts ? »

Non, j’ai froid. Je ne suis pas bien installé. Je suis fatigué et j’ai faim et soif. Je sens venir une envie de pisser.

« Je peux avoir de la musique pendant l’examen ? »

Elle me sourit et me fait non de la tête.

« Vous aurez un miroir au-dessus des yeux qui vous permettra de voir le local et si vous avez le moindre problème, vous actionnez cette poire. » Elle me la place dans la main, je l’écrase pour voir : une sonnerie retentit.

« Mais si vous le faites, ça mettra effectivement fin à la séance. Il faudra tout arrêter et peut-être fixer un nouveau rendez-vous. Vous êtes bien installé ? »

J’acquiesce.

Elle repositionne ma tête et l’immobilise avec des sangles, puis place deux gros plots très fermes contre mes tempes.

« Je pourrais bouger les pieds pendant la séance ? »

«  Il vaut mieux pas. »

« Et me gratter le nez ? Ou éternuer ?

«  Si vous devez le faire, faites-le maintenant. »

Je me dis que finalement, si ça échoue, ce n’est pas si dramatique que ça. On recommencera une autre fois.

« On y va, alors. A tout à l’heure. Courage. »

Pourquoi, « Courage » ?

Suit un long silence.
Grâce au miroir au-dessus de moi, je la vois derrière une baie vitrée, s’affairer avec un technicien. Ou peut-être les deux se préparent-ils une soirée en amoureux.
Ils semblent en tout cas m’avoir complètement oublié.

La voix de l’infirmière retentit soudain dans un haut-parleur, avec un écho métallique :
« Vous êtes prêt ? »
Non, en fait je pensais sortir me promener, tout sanglé et immobilisé dans mon carcan.

Et ça commence :
DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG. DONG.

Comme ça pendant presque deux minutes, puis un silence assez long, et ensuite :
BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM. BOM.

De nouveau un long silence, puis une nouvelle séquence de bruits de plus en plus forts. Je commence à compter les secondes, ayant déterminé que chaque séquence sonore dure entre une minute et deux minutes trente.
J’imagine que chaque séquence est une nouvelle création techno, mais ça n’aide pas.

BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE. BITE.
Ecrit, c’est bizarre, mais c’est vraiment comment sonne une des séquences.

CUL. CUL. CUL. CUL….
Non, là, je déconne.

Sans m’en rendre compte, au bout de la quatrième ou cinquième session, j’entame des exercices de mâchoire, puis je commence à me frotter le crâne contre les plots. Mais, du coup, j’ai certainement bougé!
Je m’attends à tout moment à ce que l’infirmière vienne m’annoncer que tout est à refaire, mais elle ne vient pas.
Une des pauses s’éternise.
Sa voix  retentit à nouveau :

« On a fait la moitié. Ca va toujours ? »

« Oui, oui » je fais, mais je ne sais pas si je suis entendu.

Puis de nouveau :
ROM DOM DOM DOM DOM DOM DOM DOM ROM DOM DOM DOM DOM DOM DOM DOM DOM….

Je repense au diagnostique de la neuropsychologue quelques jours plus tôt : des accidents cérébraux en cascade.
Mon esprit se désagrège graduellement, se disperse dans le néant, portion par portion.
Je ne serai bientôt qu’un légume.
Ou j’ai peut-être une tumeur qui grossit, grossit, grossit.
Il ne me reste peut-être que quelques semaines à vivre. Peut-être même moins.
Un gros coup de stress, un anévrisme, et hop, c’est fini.
Peut-être ne survivrai-je pas à cet examen ?

PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING PING
Et puis y en a marre.
J’ai des fourmis dans les pieds. Je commence à les frotter l’un contre l’autre. Du coup, tout me corps se tortille. 
J’ai foiré la séance, c’est sûr.
De nouveau un long silence, puis de nouveau la voix :

« C’est fini, je vais venir vous libérer dans quelques instants. Détendez-vous. »

Cinq minutes plus tard, je me rhabille, et l’infirmière m’annonce que je pourrais  examiner les images de l'IRM avec le technicien.
Celui-ci vient bientôt me chercher en salle d’attente.

« Alors, qu’est-ce que ça donne ? » je demande.

- Vous avez été parfait. Les images sont très nettes.

- Vraiment?

Je suis honnêtement très surpris.

Il me montre des formes abstraites noires et blanches sur des larges feuilles de pellicule plastique. Je désigne une large zone toute noire :

«  C’est mon cerveau, ça ?

- Tout-à-fait. Enfin, non, là c’est du vide. Enfin, pas du vide : du liquide encéphalique. De l’eau, quoi. Votre masse cérébrale est ici »

Et il montre une bande pas très large, plus claire, sur les côtés de la feuille.

« Ca ? Mais y en a très peu ! »
Je n’arrive pas à y croire.

«Votre cerveau a accumulé toute cette eau qui normalement s’évacue par le cuir chevelu. Chez vous, elle ne s’évacue plus, alors l'eau s’accumule,  s’accumule, poussant la masse cérébrale contre les parois. Vous avez des maux de têtes fréquents ? »

J’acquiesce.

« Ce n’est pas étonnant. Depuis longtemps ?

- Quelques mois, deux ou trois ans peut-être. Du coup, c'est grave?

- Non, ça s'opère. Mais à votre âge, il ne faut pas espérer une amélioration. Ce qui est perdu est perdu. On peut par contre stabiliser le processus. Empêcher qu'il ne s'aggrave.

J'ai du mal à intégrer toutes ses informations. C'est trop, trop vite.

- Et donc, la cause de mes maux, ce ne sont pas des accidents cérébraux ? Je pensais voir des tas de petites tâches.

- Des accidents ? Ah non, pas du tout. Qui vous a parlé de ça ?

- Une neuropsy. Mais alors, j’ai quoi ?

- Vous ? Vous êtes hydrocéphale. Enfin, vous êtes atteint d’hydrocéphalie.

Je suis  hydrocéphale.
De retour dans la rue, j’hésite entre aller boire un thé et reprendre le travail.
Je n’ai pas le cœur à ruminer. J’opte pour le retour au magasin.
J’ai des vertiges et je manque à tout moment de tomber.

Je suis hydrocéphale.
Il y a beaucoup de circulation.
C’est le début des soldes d’été et  des départs en vacances. Ca se bouscule un peu partout.
Beaucoup d’enfants particulièrement, des familles. Des couples amoureux. Des gens qui s’affairent et se pressent en tous sens.

Je suis hydrocéphale.
Ma vie s’arrête là. C’est terminé.
Il n’y a pas de réelle guérison. Pas de retour en arrière.

Je suis hydrocéphale.
J’essaie de me convaincre que c’est un rêve.
Je vais bien. Je respire, je marche. Je pense, donc je suis.
Hier, je me suis baigné au lac. J’ai mangé un banana split avec Celia. On a été au cinéma. On a dormi. On a fait l’amour. Et demain, on le refera sans doute.
Ma vie n’est pas finie.
La chanson n’a pas changé.

Si, elle a changé. Elle a un nouveau refrain.
 Je suis hydrocéphale.
Je n’ai plus qu’à en réécrire les couplets et à vivre avec.

Je suis hydrocéphale.

Je suis hydrocéphale.

Once more, with feeling.

jeudi 13 mai 2010

Objets Perdus 3: Les Clefs du Paradis.

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Cet après-midi, jour férié de l’Ascension, je suis allé faire du rangement au magasin.
Au bout de deux heures à classer des CDs, j’ai la tête qui cogne et des vertiges.
Il est temps de faire une pause.

Le Paradis, une terrasse-buvette au bord du Rhône, est hors de question, car la météo n’est pas fameuse, mais rien ne m’empêche de faire comme si : une ballade de pure relaxation le long du quai.
Hop, ma veste, une plaque de chocolat noir (à la pistache, merci Bridget !), une bouteille de thé froid à la menthe, un carnet et un crayon pour des notes éventuelles, et je suis prêt.
Il ne manque plus que … mes clefs.

Je plonge machinalement la main dans la poche droite où je les mets toujours, mais ma main ne rencontre que le vide.
J’en suis d’autant plus sûr que depuis une année, mes clefs sont retenues par un gros mousqueton qui les rend très identifiables au toucher.
Et là, pas de doute, la poche droite est vide.
J’essaye la gauche, sans plus de succès.
Dans ma veste ? Non.
Aurais-je laissé les clefs sur la porte ? Oui, c’est sûrement ça. Mais non, elles n’y sont pas.
Dans mon sac, alors ? Il m’arrive, en été, lorsque je porte des bermudas, de les laisser dans la poche de devant.
Je le fouille de fond en comble, mais rien.

Je passe plusieurs fois nerveusement les mains sur mon pantalon pour confirmer que mes poches, parfaitement plates, sont effectivement vides de clefs.
Je ne vais quand même pas rester enfermé le reste de la journée et de la nuit dans mon propre magasin ! Ni même appeler un serrurier pour me libérer.
Il me reste heureusement une solution de dernier recours : une porte-fenêtre dans le bureau mène dans la cour intérieure de l’immeuble. Je peux toujours sortir par là, mais alors comment ensuite rentrer chez moi ?
Il me revient que j’ai laissé des doubles au fonds d’un tiroir il y a plus d'un an, pour une éventualité comme celle-ci.
Je vérifie, et n’y trouve curieusement que celles de chez moi. Mais bien sûr ! J’avais déjà utilisé le double du magasin il y a quelques mois, lorsque j'avais égaré  mon trousseau sur une étagère ! Je n’avais ensuite pas dû remettre toutes les clefs en place.

Bon, mais ça ne me dit toujours pas où est passé le set de clefs initial.
Une fois de plus, je plonge la main droite dans la poche, qui est toujours désespérément vide. Sauf que cette fois, tout au fonds, mes doigts rentrent en contact avec une surface métallique. Mais c’est beaucoup trop petit pour être une de mes clefs, et encore moins le mousqueton.
Mes doigts continuent néanmoins d’explorer ce curieux objet et, petit-à-petit, celui-ci acquiert du volume, et une forme. De mousqueton. Et au bout du mousqueton, une première clef, plus une deuxième. Puis cinq en tout, dont celle du magasin, qui fait bien 10 centimètres de long et se termine par des dents aiguisées en étoile.
Mon sentiment de panique s’estompe.

J’ai toutefois plus que jamais besoin de ma pause. Et, qui sait ? Peut-être que dans le cours de ma promenade, je trouverai le Paradis ?
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lundi 3 mai 2010

Le Concert

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Il y a quelques années, j'ai failli me faire écraser par un bus, et dans les secondes qui ont suivi, j'ai revécu la scène, mais avec une issue fatale. Je ne sentais plus mon corps et j'étais dans un décor très similaire aux scènes idylliques de WHAT DREAMS MAY COME ("Au-delà de nos rêves"?). Sauf que ce n'est pas Cuba Gooding Jr qui m'accueillait, mais Bernard Herrmann.

Il m'a pris par le bras, très gentiment, et après m'avoir assuré que tout irait bien dorénavant, il m'a invité à une représentation "dead" d'une de ses oeuvres post-mortem.

Je me suis assis sur des grands gradins blancs qui auraient pu être inconfortables mais ne l'étaient pas.

J'étais le seul spectateur.

Il a levé les bras, et un orchestre invisible à commencé à jouer.

C'était merveilleux.

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samedi 1 mai 2010

Le Jardin

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J’ai négligé mon blog depuis une dizaine de jours : les 2 derniers billets ont été rédigés avant leur date de parution.
J’ai aussi un peu délaissé mon magasin.
Ou plutôt, je ne l’ai pas délaissé : j’ai simplement consacré une énergie important à un autre domaine : mon combat contre les « bonneteaux ».

J’ai par exemple préparé un prospectus à distribuer aux commerçants directement affectés par les bonneteaux, les encourageant à les boycotter.

J’ai créé un avatar de super-héros (!) sur Facebook sur la page duquel j’explique en détail mes ambitions et la source de mon courroux de justicier. J’ai aussi créé un groupe de discussion intitulé : « Devenez un kick ass! Dites non à la criminalité urbaine! ».

J’ai enfin rencontré un ami agent de police pour lui soumettre de possibles stratégies contre ces  bonneteaux.
Cette discussion a achevé de me décourager et de me déprimer. Selon cet officier, pas grand-chose ne peut être entrepris contre ces escrocs de rues.
Le problème ne vient pas tant d’après lui dans la manière de les appréhender, mais plutôt quoi en faire une fois qu’on les a attrapés.

« Tu comprends, me dit-il, les tribunaux ont déjà beaucoup de retard dans le traitement des affaires criminelles, et puis… les prisons sont pleines.

Devant ma proposition de créer de nouveaux centres de détention, plus rudimentaires que nos prisons actuelles, il m’a répondu :

« A Zurich, ils ont créé des centres provisoires pour les délinquants et les hooligans, par exemple. Mais à Genève, ce genre de choses ne passera jamais. Et puis, tout ça coûte de l’argent. Qui va payer ? Les citoyens genevois ? Mais ils n’accepteront jamais ! Tu veux que je te dise ? Les genevois ont la justice qu’ils méritent. »

Je précise ici que mon avatar de justicier sur Facebook a rencontré un certains succès, mais plus pour son caractère ludique que pour ses ambitions affichées.
Quant au groupe de discussion, très peu de gens s’y sont inscrits, et personne ne semble vouloir y contribuer.

J’ai abordé le sujet avec des amis et la famille, et invariablement, les réactions sont concordantes : « A quoi bon ? Les bonneteaux, c’est un jeu, non ? Arrêtes-ça, c’est dangereux. Laisses faire la police. Autant s’occuper des gros criminels avant de s’attaquer aux petits… »

Autrement dit, je n’ai reçu aucun soutien, même symbolique, aucun encouragement, ni même de réel élan sympathique.
Du coup, je me lasse, je me décourage.

En dernier recours, j’en ai parlé à mon médecin, qui m’a répondu : « Et votre magasin, et votre santé, et votre vie amoureuse ? Vous vous dispersez. »
Je dois reconnaître qu’elle a raison. Je me disperse, et je dépense une énergie dans un domaine où on ne m’attend pas, et dans lequel je n’ai aucune efficacité.

A ce compte-là, autant suivre le conseil de Voltaire, et s’occuper d’abord de ses petites affaires, cultiver son jardin.
Le problème c’est que par « Il faut cultiver son jardin», Voltaire voulait dire qu'il faut s'appliquer à faire évoluer la société et à la rendre meilleure plutôt que s’occuper de considérations abstraites.

Je vais donc dorénavant pervertir son dogme en m’occupant de mes affaires et laisser la mauvaise herbe gagner sur le Jardin.