dimanche 17 juillet 2011

De la difficulté à reconnaître ses amis (3).

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Ma brouille avec Cédric est consommée.

Pendant plusieurs jours, j’ai eu l’espoir que nous réussirions à résoudre notre différent.
Nous avions décidé  de nous voir face à face  pour en discuter de manière calme, mais je n’ai pas réussi à le joindre pendant plusieurs jours.
Puis il m’a proposé de passer chez lui en son absence chercher du courrier qu’il avait réceptionné en Provence.
J’ai refusé cette option et il m’a alors annoncé qu’il passerait au magasin.

Au moment dit, il a proposé qu’on se voie au bureau en tête-à-tête, ce qui n’était pas une bonne idée, vu que c’était mon territoire et un lieu restreint, mais j'ai accepté.

Il m’a alors annoncé de manière très sèche que ce n’était plus la peine de se prendre la tête et qu’il me rendait les clefs de la maison. Nous pourrions toujours rediscuter de sa venue ou non dans ma maison dans quelques mois.
Trouvant cette position un peu sommaire, j'ai fait une tentative de rationalisation :

« Tu estimes donc toujours que je te dois un plein d’essence pour chaque fois que tu me prêtes ta voiture et que tu ne me dois rien pour la maison, le chauffage ou l’usage du téléphone ?

- Si tu veux on rediscutera d’un arrangement où tu me paieras l’essence, et en contrepartie tu me compteras un loyer, la somme que tu voudras. Pour ma part, je ne ferai plus le ménage, plus le jardinage et je ne te ramènerais plus ton courrier. »

J’étais abasourdi.

« Et tes colères à répétition, ça te parait un comportement normal ?

- C’est vrai que j’ai tendance à m’emporter, mais il y a de quoi. »

A ma demande, il me rappela l’origine du dernier « pêtage de plombs » qu’il me fit dans la maison.
Cet après midi-là, il était parti faire une longue balade et j’étais resté seul dans la maison à préparer des commandes pour le magasin.
Je m’étais installé dans la cuisine avec mon ordinateur portable et des catalogues étalés sur la table de la cuisine.

A son retour, il m’annonce très rapidement qu’il va commencer à préparer le dîner.

« C’est bon, je lui réponds, je n’en ai plus pour très long. »

Et donc, pendant qu’il commence à sortir les ustensiles et à couper les premiers légumes, je tente tant bien que mal de rester concentré sur mon travail.
Les minutes passent, et je m’aperçois dans un brouillard que la préparation du repas est déjà bien avancée.

« Tu t’occupes de tout ? » je lui fais.

Et là, il frappe violemment la poêle sur la cuisinière :

«  Bien sûr que je m’occupe de tout ! Y en a marre à la fin ! Je ne suis pas ta bonniche !

- Oh là, mais qu’est-ce que t’as ?

- Depuis le début, tu comptes toujours sur moi pour faire les repas, faire les courses, faire le ménage, y en a marre ! Et puis, tu ne me parles pas sur ce ton !

Déjà que ses reproches n’étaient pas juste, mais je tentais de lui expliquer que s’il avait perçu une once d’agressivité dans ma remarque, c’était uniquement parce que j’avais été déconcentré dans mon travail, et que son activité intrusive m’avait perturbé, mais l’intention de ma question initiale visait seulement à proposer mon aide, et non à lui adresser un reproche.
Rien n’y fit : j’étais coupable de tous les maux de la Terre.
Je battis rapidement en retraite, et m’installai dans ma chambre.

Je fus tellement secoué par la violence de ses reproches que je dînai seul à la cuisine (et lui devant la télé), et je ne lui reparlai pour ainsi dire plus du séjour, qui prenait fin le lendemain.
Je lui aurais demandé qu’il parte sur le champ à Genève, mais j’aurais alors été bien embêté sans voiture.

Au final, le différend que j’ai eu avec Cédric semble venir du fait que j’ai été trop généreux avec lui. Je lui ai proposé de lui prêter ma maison autant de fois qu’il le désirait, quasiment sans restriction : j’ai même une fois déplacé une de mes visites pour accommoder une des siennes.
En retour, je lui ai emprunté sa voiture, nais pas de manière systématique dans la mesure où j’ai alterné entre la sienne et celle de Bridget.
Du coup, à vouloir lui faire sentir qu’il était chez moi comme chez lui… il a fini par se comporter comme s’il était chez lui, et c’est moi qui, dans certains cas, devenait l’intrus !

Cet incident démontre en tout cas que lorsqu’on est propriétaire d’une maison, il est tout-à-fait honorable de vouloir la partager avec son entourage, mais il faut savoir se faire respecter de ses invités et savoir en rester le maitre.

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